Découvrez régulièrement sur notre blog des articles écrits par des spécialistes et experts du monde des Ressources Humaines. Nous avons à coeur de donner à ces auteurs une totale liberté tant sur le choix des sujets que sur l’angle d’analyse. Découvrez ci-dessous l’article rédigé par Diana Roth, coach en gestion RH, conférencière, et forte de 30 ans d’expérience dans le métier.
On ne peut pas ne pas communiquer, disait le théoricien de la communication, Paul Watzlawick. Cela vaut également pour le langage non verbal des candidats durant l’entretien d’embauche, qu’il faut lire et interpréter correctement. Pour cela, il y a quelques points à prendre en compte.
Les recruteurs expérimentés cherchent à éviter autant que possible les éventuelles erreurs d’appréciation. La plupart des candidats n’échouent pas à l’entretien en raison de leurs qualifications techniques. En effet, la présélection des candidats sur la base de l’évaluation de leur CV et de leurs certificats empêche un tel phénomène. Le dossier de candidature constitue le ticket d’entrée à l’entretien d’embauche car les compétences techniques des candidats y sont présentées de façon vérifiable.
Toutefois, seule une minorité de recruteurs est formée dans l’interprétation du langage non verbal. Certains ont peut-être suivi un cours ou lu un livre sur le sujet, mais le langage non verbal reste très souvent mal interprété. En affirmant « Le corps ne ment jamais ! », Samy Molcho, expert en langage corporel, dit tout ce qu’il y a à savoir sur le langage non verbal.
Prendre en compte le contexte culturel
Dans le cadre du langage non verbal, la question de l’expéditeur et du destinataire est particulièrement importante. Au cours d’un entretien d’embauche, vous êtes aussi, en tant qu’interviewer, un destinataire et allez obligatoirement interpréter. Il est important de savoir que le langage et le corps forment une entité inséparable et sont étroitement liés au bagage culturel du candidat. Les expressions corporelles apparaissent de façon inconsciente pour la plupart des candidats, mais sont dirigées par l’esprit. Par ailleurs, il ne faudrait jamais interpréter ou évaluer des mouvements individuels de façon trop hâtive. En effet, les gestes ne peuvent être lus qu’au sein d’un contexte global.
En Suisse, il arrive régulièrement que des entretiens d’embauche soient menés avec des candidats issus d’autres horizons culturels. Ce serait alors faire preuve de négligence que d’utiliser ses propres particularités culturelles comme référence pour l’interprétation. Prenons l’exemple des salutations: si les Suisses, les Allemands et les Autrichiens vous salueront en vous serrant brièvement mais fermement la main, un candidat asiatique ou arabe pourrait tenir votre main plus longtemps. Chez les Japonais, cette façon de faire est considérée comme inconvenante. Ils préfèrent s’incliner en guise de salutations, la personne ayant la plus haute autorité s’inclinant moins que l’autre. On obtient ainsi un aperçu relativement rapide de la hiérarchie.
L’espace personnel
En Suisse, on distingue quatre types de distances. Il y a d’abord la distance intime (de 15 à 45 centimètres, réservée à la famille et aux personnes proches), la distance personnelle (entre 45 et 120 centimètres, respectée lors de fêtes d’entreprise ou d’activités sociales) et la distance sociale (entre 120 et 360 centimètres). Sous nos latitudes, c’est cette distance qui est appliquée pour les entretiens d’embauche, que ce soit en position debout pour les salutations ou en position assise pendant l’entretien. Enfin, la distance publique s’applique surtout aux présentations devant des groupes.
Les candidats originaires d’Inde, de Turquie, de France, d’Italie, de Grèce et d’Espagne ont cependant des habitudes différentes en ce qui concerne l’espace personnel. Les distances appliquées sont beaucoup moins larges, ce qu’il ne faut pas pour autant mal interpréter.
Quelques signaux non verbaux sur lesquels s’arrêter en entretien d’embauche
J’aimerais vous présenter 3 signaux non verbaux qu’il vaut la peine de remettre en question:
1. Se frotter les yeux
Le candidat se frotte les yeux à certaines questions et regarde ailleurs? On dit que les personnes qui se frottent plus souvent les yeux dans certaines situations veulent cacher quelque chose.
2. Couvrir longtemps sa bouche avec sa main
Le candidat se tient devant vous et parle ouvertement. Sa bouche n’est pas dissimulée et vous avez l’impression qu’il dit la vérité. Soudain, pour répondre à une question, il couvre sa bouche avec sa main. A cela s’ajoute encore un toussotement unique. Ces gestes peuvent indiquer une incertitude intérieure.
Conseil: Abordez à nouveau le même sujet à travers une autre question et observez son comportement. Et gardez toujours à l’esprit que le contexte global est essentiel.
3. Remettre son col en place
Le candidat vous dit: « Cela ne me pose aucun problème. » Pile à ce moment-là, il remet son col en place. Insistez. Demandez-lui un exemple concret et observez si cette gestuelle persiste, accompagnée peut-être d’autres éléments de langage non verbal suspects.
Que faire lorsque vous n’êtes pas sûr/e de la façon d’interpréter un geste? D’après mon expérience, mon conseil est le suivant: parlez de ce qui vous titille au candidat et insistez de façon claire mais polie. La réponse pourrait vraiment vous surprendre.
Je vous donne un exemple: j’ai rencontré un candidat qui a placé son bras droit comme un mur entre lui et moi tout au long de l’entretien. Ce geste m’a troublé car il répondait très ouvertement à toutes mes questions. A la fin de l’entretien, je lui ai donné le feedback suivant: « Je vous remercie pour cet entretien. Je vous ai trouvé très spontané et proactif. Ce qui m’a toutefois beaucoup dérangé, c’est que vous avez gardé votre bras devant vous pendant presque toute la durée de l’entretien! »
Il a souri, amusé, et m’a répondu: « Je me suis blessé en jouant au tennis hier soir et je voulais ne pas le montrer. Merci d’aborder la question. » Cet exemple montre à quel point il est important de ne pas simplement tirer de conclusions mais de clarifier ce qui nous dérange en posant des questions plus concrètes ou en abordant directement le sujet.
« Notre corps est bien plus bavard que nous », affirme le célèbre expert du langage non verbal Samy Molcho. Pensez-y: tout comme vous observez les candidats et interprétez ce que vous voyez, les candidats en font de même, sauf qu’ils ne sont pas en position d’aborder ce qui les dérange. Demandez donc toujours un feedback sur l’entretien. Vous aurez ainsi la possibilité d’écarter les éventuelles mauvaises interprétations.
Coach en gestion RH indépendante depuis 2003 (www.dianarothcoaching.com), Diana Roth se consacre entièrement au domaine qui lui tient à cœur à travers ses activités de conférencière, d’experte, d’auteure et de podcasteure. Forte de 30 ans d’expérience dans le métier, elle soutient les responsables RH et les dirigeants de PME dans les défis qu’ils rencontrent au quotidien en matière de gestion du personnel.