Les entreprises sont-elles libres de rédiger leurs offres d’emploi comme elles l’entendent ou existe-t-il un cadre législatif? Avocat spécialisé dans le droit du travail et expert dans le domaine, Roland Bachmann nous répond.
Mathias Steger: M. Bachmann, existe-t-il un cadre législatif concernant la rédaction d’offres d’emploi en Suisse?
Roland Bachmann: Dans certains cas, une offre d’emploi discriminatoire peut dissimuler tout un système de recrutement discriminatoire. Les offres d’emploi doivent donc être rédigées de façon non discriminatoire. C’est ce que prévoit la Loi sur l’égalité. Il est interdit de discriminer les employé(e)s en raison de leur sexe de façon directe ou indirecte (art. 3 al. 1 LEg). Cette interdiction s’applique notamment au recrutement (art. 3 al. 2 LEg). Personne ne peut être désavantagé ou exclu d’un poste en raison de son sexe. Par comportement discriminatoire, on entend tout comportement fondé sur l’appartenance sexuelle qui porte atteinte à la dignité des femmes et des hommes sur leur lieu de travail. Cela comprend aussi les comportements inopportuns à caractère sexuel (art. 4 LEg).
L’article 18 alinéa 1 de la LES prévoit également des règles particulières concernant la publication d’offres d’emploi par les agences de placement. Ces derniers doivent indiquer leur nom et leur adresse exacte et mentionner clairement que les travailleurs seront engagés pour la location de services.
En Suisse, les offres d’emploi doivent-elles être formulées de façon neutre en termes de genre ou est-ce facultatif?
Une formulation neutre en termes de genre est facultative, mais elle est considérée comme la norme en Suisse. Si une offre d’emploi donne l’impression que seule une personne d’un sexe donné pourra être embauchée, cela peut indiquer, comme mentionné plus haut, un système de recrutement discriminatoire. Non seulement cela porterait préjudice à la réputation de l’entreprise, mais cela poserait également des problèmes d’ordre légal.
Il est conseillé de veiller à s’adresser directement aux femmes afin de promouvoir l’égalité des chances. Les mesures appropriées visant à promouvoir dans les faits l’égalité entre hommes et femmes ne constituent pas une discrimination (art. 3 al. 3 LEg). Il arrive donc que les offres d’emploi précisent que, pour améliorer la proportion de femmes, ces dernières sont invitées à postuler en particulier. Ce type d’indications est admis.
Les offres d’emploi discriminatoires doivent-elles faire face à des conséquences d’ordre légal?
S’il y a bien eu une discrimination à l’embauche, les personnes victimes de cette discrimination peuvent exiger de l’employeur une motivation écrite de sa décision (art. 8 al. 1 LEg) ainsi qu’une indemnité (art. 5 al. 2 et 4 LEg). Il y a déjà eu quelques cas qui se sont soldés par une indemnité de ce type.
Toutefois, je n’ai pas connaissance d’un seul cas où une indemnité aurait été versée suite à un refus d’embauche, justifié uniquement par la formulation de l’offre d’emploi. La discrimination à l’embauche fait référence non pas à l’offre d’emploi mais à la décision de l’employeur.